Nouvelle jurisprudence: faites vous indemniser votre journée de travail perdue

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         La Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) a récemment apporté des clarifications sur ce que doit couvrir l’indemnisation prévue par le règlement européen en cas de vol perturbé et lorsque le voyageur perd un jour de travail.  

         Des passagers avaient réservé, auprès de la compagnie roumaine Blue Air, un vol Bacău (Roumanie) – Londres (Royaume-Uni), ville dans laquelle ils exercent leurs fonctions. Suite à un surbooking du vol, ils se sont vus refuser l’embarquement, et ont été placés sur un vol partant 5 jours plus tard. Malheureusement, cela leur a fait manquer des jours de travail, résultant non-seulement en des retenues de salaires mais aussi, pour l’un d’eux, en un blâme de la part de ses responsables.

Les passagers ont bien obtenu de la compagnie les 400 euros d’indemnisation forfaitaire prévus par le règlement européen. Ils ont cependant réclamé une compensation supplémentaire, leur préjudice étant selon eux plus élevé. Devant le refus de la compagnie, arguant que l’indemnisation réglementaire couvrait déjà lesdits préjudices, le tribunal roumain saisi de l’affaire a donc décidé de poser la question à la CJUE.

Les juges du fond ont sollicité la CJUE pour lui demander des précisions et une réponse à la question suivante : est-ce que l’indemnisation forfaitaire prévu par le règlement européen couvre-t-elle tous les préjudices causés par la perturbation d’un vol, ou est-ce que les passagers sont en droit de réclamer une réparation plus importante notamment un préjudice personnel ?

La Cour a répondu de la sorte :

  • L’indemnisation forfaitaire (250, 400 ou 600€) « ne vise qu’à indemniser les préjudices qui sont quasiment identiques pour tous les passagers concernés ». Cela signifie que l’indemnisation existe pour dédommager les passagers d’un vol pour les désagréments qu’ils ont en commun : les heures (ou jours !) d’attente, le stress provoqué, le fait de ne pas arriver à destination à l’heure prévue, etc.

  •  La perte de salaire correspond à un “préjudice individuel”, qui n’est pas commun à tous les passagers d’un même vol. Pour un vol retardé par exemple, tous les passagers ont été victimes du retard, mais la perte d’un jour de salaire ne concerne que certains d’entre eux.  Ces passagers peuvent donc, même s’ils ont obtenu une indemnisation forfaitaire, réclamer en plus de celle-ci une réparation pour la perte de salaire causée par le retard. Attention, la Cour précise cependant que cette réparation complémentaire n’est pas rendue obligatoire par le règlement européen, mais seulement est permise ! Elle dépendra du droit national de l’État où le juge est saisi.

  • En effet, la CJUE rappelle que la décision d’accorder une réparation supplémentaire relève du pouvoir souverain des juges nationaux. Il revient donc aux juges des différents Etats membres de l’Union Européenne d’apprécier dans quelle mesure une compagnie doit accorder une réparation supplémentaire aux passagers.

  •  En outre, la Cour précise que l’indemnisation complémentaire doit être interprété en ce sens qu’il permet au juge national compétent d’effectuer la déduction de l’indemnisation accordée en vertu de ce règlement de l’indemnisation complémentaire, mais ne l’oblige pas à le faire, ledit règlement n’imposant pas au juge national compétent de conditions sur la base desquelles il pourrait procéder à cette déduction. Ainsi, si vous avez droit à 400€ et que la compagnie accepte de vous compenser pour la perte d’un jour de salaire, la compagnie pourrait considérer que les 400€ couvre la perte de salaire. Pour le passager, il est donc intéressant de porter une réclamation seulement si le montant de son préjudice dépasse le montant de l’indemnité réglementaire.

En conclusion, cette décision vient donc préciser des droits supplémentaires du passager, qui subissent souvent des préjudices supérieurs à l’indemnisation forfaitaire, notamment lorsque les passagers d’un vol ratent des jours de travail. Les passagers sont donc en droit de demander le cumul de l’indemnisation forfaitaire et de la réparation d’autres préjudices qui leur sont propres, comme la perte de salaire.

Il faut également remarquer que les passagers pourront demander la réparation d’autres préjudices. Alors qu’il arrive très fréquemment que les passagers perdent une ou plusieurs journées de location ou bien une nuit d’hôtel, ces frais n’étaient auparavant que rarement pris en compte par les compagnies. Ils pourront donc présenter, en plus d’une réclamation pour obtenir l’indemnisation, une demande de réparation pour ces autres préjudices.

Attention, il convient de retenir que cela dépendra de l’appréciation du juge national, seul décisionnaire. Pour le moment, la jurisprudence française n’a que peu traité de la question. Il faudra attendre donc de nouvelles décisions pour savoir si en France les juges obligent les compagnies aériennes à réparer les préjudices individuels sans en déduire l’indemnité forfaitaire.

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